Quand j’étais plus jeune, je détestais les chaussures, je trouvais que ça faisait mal, que c’était inutile et que c’était laid.
De mon temps…
Dés que les beaux jours arrivaient, j’envoyais valdinguer mes chaussures et je marchais pieds nus que ce soit sur des cailloux, du bitume chauffée par le soleil, des herbes douces,des ronces.
On me disait : « tu vas marcher sur un morceau de verre, tu vas te planter une punaise, tu vas attraper des cochonneries ». Que nenni, j’enlevais mes sandales et je partais en courant. C’était une autre époque !
Mais voilà quand la rentrée des classes pointait son nez, il fallait bien que je me résolve à enfermer mes petits petons dans ces boites à lacets !
Du coup, la classique séance de shopping s’arrêtait d’office dans un magasin de chaussures.
Et là bonjour l’horreur : « c’est laid, je ne suis pas bien, ça me sert, beurk la couleur est affreuse ». J’en passe et des meilleures!
Je pouvais faire preuve d’une mauvaise foi et d’un manque cruel d’effort pendant des heures. A tel point qu’à la fin ma maman ou ma sœur finissait toujours par me dire :
-on prend celle la
-mais…
-on prend CELLE-LA.
C’est leur faute, aussi!
Je reconnais que cette antipathie profonde a durée longtemps, non en fait ça dure toujours ! Puis franchement, elles ne font aucun effort, elles sont toujours cher, me serrent …
Je porte mes chaussures des années durant parce que de toutes manières, je sais que je ne trouverais rien qui me plaise et que ça me fatigue d’avance (puis il n’y a plus personnes pour décider à ma place ce qui des fois serait quand même bien commode.).
En fait, j’exagère, il y a un temps où je me suis mis à aimer les chaussures, et même à aimer en acheter.
J’étais tombée amoureuse des escarpins.
C’est tellement fin, tellement délicat et ça sublime tellement une dame.
Je n’en avais pas des masses parce que ce qui est sûre c’est qu’en terme de chaussure j’ai gardé un oursin dans le porte monnaie.
Mais j’en avais et je les portais et je les portais même avec fierté !
Des béquilles et des roues
Puis comme je vous l’ai déjà dit, un jour j’ai commencé à utiliser une canne puis deux puis un fauteuil.
Le problème a commencé avant même la canne; dès que je me suis mis à marcher d’une démarche incertaine ressemblant à une personne éméchée et à avoir des pertes d’équilibre.
A partir de là, mes escarpins sont restés au fond de mon placard.
Je les voyais encore et je les regardais avec un note de nostalgie.
J’ai même pensé à les mettre en vitrine un peu à la façon « Sex and the city » !
Puis un jour, peut être quatre ans après le jour où je les ai remisés dans le placard, j’ai pris une grande décision. J’ai choisi une amie qui en portait et que j’appréciais beaucoup et je les lui ai donnés.
Un peu comme si je lui confiais un chaton, je lui ai fait mille recommandations et elle est repartie le sourire aux lèvres avec mes escarpins André Manoukian.
Oui je me souviens de la marque et même du modèle ! Ils étaient. Noir avec .. non mais en fait, on s’en fout…. mais qu’est ce qu’ils étaient beaux !
A partir de ce jour là, j’ai recommencé à ne plus m’occuper de mes chaussures et à me dire que de toutes manières c’était laid !
Un peu réducteur et hâtif comme jugement, je l’admets mais je ne voulais pas chercher plus loin.
Toujours des pieds et des roues mais des chaussures aussi!
Pourtant il y a une année, j’ai été invité à un mariage.
J’ai choisi une belle robe, trouvée l’étole pour aller avec et n’ayant pas de chaussures corrects (oui c’est le défaut d’être butée comme un âne) j’ai demandé à une amie si elle n’en aurait pas à me prêter.
Elle m’a montré des escarpins noir ouverts avec des talons de 7 cm.
Au début, je lui ai bien sur dit « ça je ne peux pas les porter ».
Ce à quoi elle m’a répondu « mais de toutes manières tu ne comptes pas marcher, si ? ».
Ah oui, c’est vrai je suis en fauteuil roulant.
Il faut quand même savoir que porter des talons sur un fauteuil roulant, au début, n’est pas plus facile que d’apprendre à marcher avec : il faut trouver une manière de poser ses pieds sur le cale pied sans que ceux-ci ne tombent ni que vous ayez à poser votre menton sur vos genoux.
Mes talons et moi
Bref, ce jour là j’ai mis les escarpins de mon amie.
Et là révélation, c’était trop bien !
Je pouvais, à cette époque, me lever un peu de mon fauteuil.
Là je l’ai fait et je peux vous dire que mon sourire aurait pu faire fondre une banquise.
Alors certes, j’avais un équilibre très précaire mais ça c’était le cas que je porte des baskets ou des escarpins.
Aujourd’hui, je ne marche plus du tout et je garde les fesses bien vissées dans mon fauteuil mais je porte des talons sans me poser de question existentielles!
Ça demande une certaine technique je l’admets pour les enfiler, ne pas glisser… mais quel bonheur!
Je n’en porte pas tous les jours, en même temps aller à l’escrime en talons, je ne suis pas sûre que ça soit très adapté!.
Ça peut paraître anecdotique voire même idiot, mais c’est un peu comme les corsets, ce sont des accessoires qui m’aident à reprendre confiance en moi et à me réconcilier avec mon image corporelle.
Alors vive les talons!
Toujours sur le thème de la mode, vous pouvez aussi lire Handicapée et jolie, « Mon histoire d’amour avec les corsets » et bien-sûr allez dévorer tous les articles de Cover dressing!
Bravo pour ce très beau site plein d’optimisme ! Je m’y suis abonnée…
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