Média et handicaps, REFLEXIONS

« Le grand bain »: quand le handicap est un détail

By Circée Peloux

J’ai eu la chance de voir « Le grand bain » en avant première, il y a quelque mois.
Il est sorti mercredi dernier, le moment parfait pour vous en parler!

 Le grand bain, synopsis,

C’est une comédie réalisée par Gilles Lellouche que je connaissais surtout pour son travail d’acteur.
Le casting est à faire pâlir tout film français : Mathieu Almaric, Guillaume Canet, Benoit Polvoerde, Marina Fois et j’en passe.
A noter le premier rôle cinématographique du chanteur Philippe Katerine.

L’histoire est celle de huit hommes qui pratiquent ensemble la natation synchronisée.
Ils sont entraînés par Delphine (Virginie Efira);
Ils décident un soir de participer aux championnats du monde de natation synchronisée masculine qui aura lieu en Europe du Nord.

Va s’en suivre alors toute leur préparation.
On va aussi voir toutes les difficultés qu’ils rencontrent dans le regard des gens notamment : « la natation synchronisée, c’est pour les pédales ».

Pourquoi en parler ?

Dans le synopsis, le handicap physique n’apparaît à nulle part pourtant si je vous parle de ce film, il y a bien une raison.
Au cours du film, Delphine abandonne son équipe, accaparée par sa vie personnelle qui lui devient insupportable.

Amanda prend alors le relais.
Amanda est en fauteuil roulant.

On peut penser qu‘elle est l’ancienne partenaire de nage de Delphine.
Elles participaient ensemble à des compétitions internationales.
On peut le penser parce que Delphine parle à un moment de son histoire, mais rien n’est jamais expliqué par rapport à Amanda.

Le personnage d’Amanda

Amanda est jouée par Leila Bekhti.
Et si vous vous souvenez bien, c’est une actrice avec deux jambes qui fonctionnent à ce jour très bien.
Je ne peux pas parler de ce film sans regretter une fois de plus le choix d’une personne valide pour jouer une personne à mobilité réduite.

Cela crée évidemment des incohérences risibles pour toute personne qui connaît le handicap.
A commencer par son fauteuil roulant.
Même mon premier fauteuil roulant sécurité sociale devait être plus léger et pratique.
Puis la scène où elle coache ses élèves, pendant un footing, en les regardant courir, installée dans le sable…
Comment est-elle arrivé là?
Je suis sportive et pourtant je vous jure que rouler dans le sable, je ne sais pas faire.

Puis que dire de cette scène où un de ses nageurs la pousse dans l’eau et où elle coule tout simplement.
Pour rappel, ce n’est pas parce que l’on n’a plus le contrôle de ses jambes que l’on n’a pas des bras et que l’on ne peut donc pas se déplacer dans une piscine.

La richesse de ce film

Mais ce qui fait de ce film un ovni dans le paysage cinématographique français, c’est qu’un des personnages est handicapé sans que ce soit du tout le sujet du film.
Certes, il y a des incohérences mais ce n’est pas le plus important.
Amanda est handicapée comme elle pourrait être immigrée, grosse, petite…., ce n’est qu’un détail.

La seule scène où le handicap sert de ressort pour un effet comique est lors de leur voyage en camping car.
Ils sont alors tous couchés par terre « en tas de rats », stressés par le championnat du monde du lendemain.
Ils parlent et Amanda se fâche et leur dit « vous voulez que je me lève ».
Évidemment, ils rigolent tous.

Amanda est une coach de la vielle école : elle motive ses élèves en leur criant dessus, en les insultant.
Peut-être, est-ce parce qu’elle est aigrie à cause de son handicap ou peut être pas.
Des coachs de cet ordre à haut niveau, on en connaît et ils sont tout à fait valides.

De quoi se réjouir

Cela faisait longtemps que je n’avais pas vu un film que je trouve foncièrement motivant et réjouissant.
Et une des premières fois, que je vois un film où le handicap apparaît sans que ça n’en devienne le sujet.

C’est une comédie dramatique.
Je dirais même que c’est un film social.

On y voit la détresse de personnes perdus dans un monde qui n’attend personne.
Un monde où « soit tu marches, soit tu crèves ».
Il y a parfois des longueurs parce que l’on prend le temps de connaître et de comprendre ses personnages principaux.

Le jeu des acteurs et la manière de filmer est à mon sens remarquable de simplicité touchante.
Et voir enfin dans un film français, un personnage handicapé sans que l’on ne s’appesantisse sur son handicap est tout simplement un vrai plaisir.

Je vais leur laisser le dernier mot en citant une phrase du film qui m’a beaucoup plu: « et on ne pourra plus douter qu’un carré peut rentrer dans un rond et réciproquement».

 

Cet article était à l’origine pour ma chronique dans Cover dressing.
Sauf, qu’ils se consacrent désormais à leur label « Bien à porter » pour que la mode soit accessible à tous.
Du coup, j’ai décidé de le publier ici parce que ce film m’a plu.
Si ce genre d’articles vous plaît, dites le moi et je rédigerais ici les articles que je réservais à Cover dressing.

2 réflexions au sujet de “« Le grand bain »: quand le handicap est un détail”

  1. J’ai vu ce film et je l’ai beaucoup apprécié pour tout ce qui s’en dégage… notamment que les apparences ne représentent en rien la réalité même si notre société est actuellement basée sur ces apparences et les jugements intempestifs qui en découlent.
    Je ne suis pas handicapée, ce qui, sans doute ne me permet pas de voir ce film sous le même angle que vous, meme si j’essaie. Je comprends ce que vous voulez dire quand vous parlez de l’absence de mise en avant de la personne en fauteuil roulant, sans pourtant minimiser son rôle dans le film.
    J’ai un fils « différent » pour des raisons de santé et j’ai apprécié ce film où malgré leurs difficultés, toutes ces personnes différentes à leur façon, en étant solidaires les unes des autres ont réussi à relever un défi qui était loin d’être gagné à la base. J’aimerai que ce genre d’histoires se produise plus souvent dans la vraie vie et que l’empathie et la bienveillance prennent le dessus sur l’individualisme et le jugement.
    Bravo pour ce que vous faites en tous cas. Vos écrits me parlent et me touchent à chaque fois que je les lis.

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