J’entends souvent des personnes sur les blogs ou verbalement dire qu’il faut se battre contre la sclérose en plaques.
Cette expression me dérange depuis longtemps sans que je n’arrive vraiment à l’expliquer.
Se battre contre
La première image qui me vient en réfléchissant à l’expression « se battre contre » ce sont des cafards!
Effectivement, on se bat contre les cafards quand ils se mettent à envahir nos placards.
Je me souviens d’une invasion de puces de bois que j’ai eu à combattre chez moi, un jour.
Je vous garantis que là, l’expression est bien choisie.
J’ai sorti:
mes armes– fumigènes, insecticides
ma tenue de combat – de vieux habits allant des pieds à la racine de mon front (enfin presque!)
mes consignes de sécurité – retraite chez des voisins le temps que les produits agissent
Puis reconnaissons le, je suis sortie du combat, épuisée!
Certes ce sont de petits combats, on n’en meurt pas (mais je vous jure que se retrouver avec les jambes noires de puces n’est pas ce que l’on appellerez une expérience réjouissante!).
Il y a des tas de combats, chacun les siens.
Il n’en reste pas moins que le combat est un terme guerrier qui relève du vocabulaire militaire, qui recèle une certaine violence.
Combat
Parce que « se battre » contre en fait c’est cela, un combat.
Dégainons le petit larousse :
- Engagement limité dans l’espace et le temps de formations terrestres, aériennes ou navales adverses.
- Fait de se battre avec des forces adverses
- Lutte où deux adversaires s’affrontent dans des jeux sportifs selon certaines règles et afin de remporter un titre, un trophée, etc. → mon combat préféré !!
- Lutte d’animaux dressés à un type de jeu.
- Toute lutte menée contre des adversaires ou en faveur de quelque chose : Le combat de la presse contre le pouvoir.
- Toute lutte menée par divers moyens contre des obstacles divers, des dangers de toute nature : Combat contre la maladie.
- Littéraire. Opposition ou lutte de forces antagonistes : Le combat de la vie et de la mort.
Il y a en fait (comme d’habitude) beaucoup de sens.
Le résultat
Mais en fait quelle que soit la définition, un combat est fatigant.
Il demande beaucoup d’énergie, à tendance à effacer tout le reste.
Être malade est un combat, il ne faut pas se leurrer, et je ne crois pas que quiconque me dira le contraire.
On se bat pour retrouver la santé, pour ne pas mourir, pour tuer les cellules cancéreuses…
La sclérose en plaques est une maladie grave et rentre donc dans cette définition, dans ces maladies qui sont un combat.
Par contre, l’expression « se battre contre » me dérange.
La sclérose en plaques, depuis dix ans, qu’elle m’accompagne fait partie de moi.
Elle n’est pas moi, ne me définit pas mais si on veut me comprendre, si on a envie de me connaître, on ne peut ignorer sa présence.
Peut on véritablement se battre contre quelque chose qui fait partie de soi au sens physique du terme?
Peut on se battre contre soi-même?
Juste mesure
Ne pas se battre, n’est pas se laisser aller.
Il est trop simple de penser que s’il l’on ne se révolte pas cela veut dire qu’on est d’accord.Quand on est adolescent, le monde est souvent noir ou blanc: on aime ou on déteste, c’est bien ou c’est mal, c’est beau ou c’est laid.
Mais ce qui défini la vie ce sont aussi ses nuances et notre capacité à s’adapter, à évoluer.
Cet après midi, une personne m’a décrit un exercice de sophrologie qui lui est venu à l’esprit quand je lui ai parlé de cet article.
Imaginons un groupé scindé en deux.
Une partie se visualise comme des algues flottant entre les eaux, remuant au gré des vagues.
Les autres sont des poissons qui circulent entre ses « algues ».
Puis les algues se transforment en piquet plantés dans le sol, les poissons continuant à circuler entre eux.
Cette deuxième partie est bien moins agréable pour les algues/poteaux parce qu’alors les poissons doivent bousculer pour passer en force ce qui est beaucoup plus fatigant et douloureux.
N’est-ce pas une bonne image concernant la vie en général?
Se battre avec
Je ne dis pas que je ne me bats pas.
Je me bats.
Mais pas contre elle.
Je me bats avec elle, pour moi.
Le combat contre la sclérose en plaques en elle même, je laisse la médecine le faire.
Déjà parce que pour eux c’est un ennemi quantifiable, définissable et parce que même s’ils ne l’ont pas aujourd’hui, ils auront la solution un jour.
Moi, je n’ai pas de solutions pour faire disparaître les lésions qu’elle a créées dans mon cerveau ou celui des autres sépiens.
Je ne peux qu‘avoir des solutions pour que ma vie avec elle me plaise et partager ce que je suis avec d’autres personnes malades ou non comme avec ce blog ou le projet Novartis).
Elle fait partie de moi et on avance de concert.
Alors, c’est vrai des fois, si je pouvais la faire se matérialiser et lui botter les fesses, je le ferais.
Mais aujourd’hui, j’ai conscience qu’elle n’a pas que du mauvais et que surtout me battre contre elle m’épuise parce qu‘elle n’est pas une bestiole que je peux désinsectiser ou un mec aux mains baladeuses que je peux gifler.
Alors, je combats mais je combats pour que l’on puisse vivre côte à côte sans qu’elle prenne toute la place, sans que je disparaisse à son profit.
Je ne me bats plus, je vis tout simplement avec toute ma force et mes faiblesses.
Un très beua texte, super inspirant. Il m’a beaucoup touché par sa sensibilité. Merci à vous pour ce très beau partage.
J’ai vraiment beaucoup aimé ton article et te rejoins sur plein d’aspects. Tu as tellement raison quand tu dis que la maladie ne te définit pas. Qu’elle fait partie de toi Oui, mais que tu te bats avec. Se battre contre quelque chose a définitivement un aspect négatif de depart. En tout cas, tes mots amènent à réfléchir. Et Merci pour ca 🙂
Merci!
Il m’a fallu du temps avant de mettre en mot ce que je sentais au fond de moi sans savoir l’exprimer.