Article écrit pour Cover Dressing.
Petit retour dans le temps, en 1994 précisément, pour parler d’un film emblématique, sorti en salles alors que j’étais encore une jeune adolescente : Forrest Gump.
Synopsis
Adapté du roman du même nom de Winston Groom (1986), Forrest Gump a été réalisé par Robert Zemeckis, il est sorti en salle en 1994 et il a obtenu pas moins de six oscars.
Il raconte l’histoire de Forrest Gump (interprété par Tom Hanks), un simple d’esprit – ou, de manière plus politiquement correcte, « un homme autiste avec déficience intellectuelle » – et de son errance à travers les événements qui bousculent la société américaine, des années 50 aux années 80.
La scène d’introduction est devenue culte : on y voit Forrest, assis à un arrêt de bus, raconter son histoire aux passants ; son enfance, sa différence, son engagement durant la guerre du Vietnam, les amis qui ont traversé sa vie, et surtout de son amour de toujours, Jenny.
Un homme au cœur d’une immense fresque historique
Même si ce n’est pas le souvenir que j’en avais gardé, ce film est une très belle fresque historique des États-Unis entre 1950 et 1980.
Ce n’est pas une histoire vraie, ce n’est même pas toujours un film réaliste, mais son contexte historique très présent s’appuie sur des faits bien réels : la guerre du Vietnam, la contestation hippie, le scandale du Watergate, etc…
Pourtant, ce qui en fait un film à part, touchant, et qui me donne aussitôt envie de m’enfoncer dans une couette épaisse en buvant un chocolat chaud, c’est la manière dont le personnage central parle de ces événements, en racontant simplement sa vie, sans chercher à analyser ou même à comprendre ce qu’il vit.
J’ai cette impression, comme si Forrest s’adressait directement à moi quand il dit que « la vie c’est comme une boite de chocolat, on ne sait jamais sur quoi on va tomber ».
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Raconter le handicap sans faire un film sur le handicap
Alors que nous parlions de ce film, un ami m’a dit : « En voilà, un film qui parle du handicap ».
Je l’ai regardé avec étonnement : ce film il ne parle pas du handicap, il parle de Forrest Gump !
Mais c’est vrai, Forrest Gump est une personne atteinte d’un handicap mental. Lieutenant Dan, revient de la guerre amputé des deux jambes. Et dans le cas du personnage de Jenny, ne peut-on pas parler de handicap social dû à une enfance plus que chaotique ? On ne peut pas dire que le handicap est un fait secondaire. Et pourtant, ce n’est pas le sujet du film.
Pour une fois, c’est comme la vie – ma vie.
Le handicap en fait partie, il est à prendre en compte dans chaque situation, dans chaque élément et pourtant il n’en est pas le sujet principal.
Chaque personnage possède un trait qui le différencie des autres sans le définir totalement : il y a celui qui n’a plus ses jambes, celui qui a une intelligence limitée, celui qui est noir, celle qui est une maman, ceux qui sont militaires.
Une vision simple, mais jamais simpliste, du handicap
Alors puis qu’effectivement, ce film aborde le handicap, j’ai regardé d’un peu plus prêt sa manière de le traiter.
Il y a un certain naturel, dans les situations présentées, que je retrouve rarement à l’écran.
Le trait n’est pas poussé, on ne se cache pas derrière l’humour, même si le film est drôle.
Je pense à une scène où le lieutenant Dan dit à Forrest qu’il veut voir s’il a le pied marin. Forrest remarque naïvement : « Mais vous n’avez pas de pieds ». « Ça, je le sais », lui répond le lieutenant Dan. Une réplique assez drôle en elle-même sans qu’il n’y ait besoin de forcer le rire des personnages et donc celui du public.
L’utilisation des mots est aussi parfois étonnante.
Je ne suis pas sûre qu’aujourd’hui, il serait encore possible d’utiliser les mêmes termes sans choquer.
Quand Forrest découvre qu’il est papa, sa première réaction est de demander si son fils est « normalement intelligent ».
On voit alors, dans ces quelques mots que plus personne n’oserait aujourd’hui prononcer, toute la souffrance de Forrest.
Une autre scène est aussi vraiment marquante : on y voit le lieutenant Dan flirter avec une prostituée, à califourchon sur ses genoux, dans le fauteuil roulant. Pourrait-on encore montrer ce genre d’images sans créer la polémique, en particulier à une époque où la question de l’assistanat sexuel fait plus que jamais débat ?
Mes nouveaux sentiments devant ce film
Je suis souvent critique vis-à-vis du handicap : est-ce que j’arrive à m’identifier aux personnages handicapés ? Est-ce que je les trouve réalistes ?
Dans ce film, le réalisme n’est pas vraiment de mise – et ce n’est pas grave.
J’ai regardé Forrest Gump il y a quelques jours, pour la quinzième fois au moins, mais pour la première fois depuis que j’ai souscris à l’option handicap.
Je ne m’identifie pas à Forrest Gump, ni au lieutenant Dan, ni à Jenny mais un peu à tous.
Ils sont tous des tranches de ma personnalité et c’est peut être ce qui me les rend tous si proches.
Une scène m’a toutefois particulièrement marquée : le moment où le lieutenant Dan, matelot sur le crevettier de Forrest, invente un système qui lui permet de se hisser en haut du mat dans les cordages du bateau.
Les deux hommes subissent un ouragan énorme alors qu’ils sont en mer.
Durant cette tempête, on voit le lieutenant au milieu des éléments, accroché avec un bras, appuyé sur ses moignons, hurlant autant qu’il peut en défiant les éléments et Dieu de venir le chercher.
Cette colère qui l’envahit et qu’il hurle au ciel m’a donné des frissons.
J’ai réalisé que j’en étais là, moi aussi, sur le mât, à défier quiconque de me faire descendre.
Ce film n’est peut être pas toujours très réaliste mais il aborde de nombreuses thématiques dont notre société commence seulement à parler ouvertement.
Pour moi, Forrest Gump est un film rempli d’émotions simples où l’on ne se cache ni derrière l’humour, la violence ou les clichés.
A voir et à revoir.
Pour continuer sur le cinéma, vous pouvez aller lire ou relire: Ne touchons pas à intouchable, les personnages porteurs de handicap, handicap au cinéma: toute ressemblance avec….
Magnifique article ! Il me donne envie de revoir illico ce film que j’avais aussi beaucoup aimé.
Hihi!! C’est une très bonne idée!