Des changements de notre corps, ils s’en passent tout au long de notre vie. Certains sont prévisibles, d’autres nous prennent au dépourvu.
Les changements de notre corps
Quand on est enfant, notre corps est en perpétuel changement. L’enfant apprend de nouveaux gestes tous les jours, il découvre chaque matin de nouvelles capacités.
Quand on est adolescent, notre corps change du jour au lendemain.
Quand on est enceinte, le corps vit tout un tas de modifications pour accueillir ce nouvel être en devenir.
Quand on vieillit, nos possibilités évoluent, les mouvements deviennent moins fluides, plus coûteux en énergie.
Et on s’y fait, on s’adapte mais ce n’est pas sans heurts.
Rappelez-vous, quand vous aviez quinze ans, ou comme les enfants hurlent quand ils tombent deux cents fois, ou comme vos parents souffrent de ne plus faire ce qu’ils faisaient avant.
Et pourtant ces changements, ils sont plus ou moins prévisibles.
Les changements suite à une maladie
Dans le cas d’une maladie ou d’un accident, on se retrouve du jour au lendemain avec un corps différent, avec des capacités revues à la baisse et on n’y est jamais préparé ou si peu.
Il fut un temps où je ne reconnaissais plus ce corps modifié par la maladie, où je ne pouvais plus me regarder dans un miroir.
J’ai du m’habituer à ne plus faire tout ce que je faisais avant, à apprendre comme un enfant les gestes que l’on fait sans réfléchir (marcher, se lever…).
Ça n’a pas toujours été facile.
Il m’a fallu du temps.
Je me suis cogné la tête contre des murs virtuels en voulant faire comme avant, comme s’il n’y avait eu aucun changement.
Puis comme tout être humain je me suis adaptée.
Je n’ai pas « arrêté de vivre » comme beaucoup me l’ont dit mais j’ai appris à vivre différemment.
Toujours des changements, encore des changements
Je croyais innocemment que toutes les adaptations étaient derrière moi ou alors loin devant.
Je le croyais, ou je voulais le croire.
Il y a un mois, j’ai eu une poussée de ma maladie.
Cette fois, mes jambes m’ont lâchées. Vous pensez peut être que ce n’est pas un si grand changement que ça, puisque je suis en fauteuil depuis cinq ans.
Mais en fait, mes jambes étaient de la pâte à modeler, elles sont devenues du chewing-gum et ça a apporté beaucoup de changements dans ma vie.
Je ne peux plus contrôler mes jambes donc me déplacer dans mon salon ou simplement passer d’une chaise à une autre en prenant appui sur une de mes jambes. Alors, comme les personnes paraplégiques, je découvre le bonheur des vrai transferts qui utilisent juste les bras .
Ils sont encore un peu hésitants et je manque encore régulièrement de tomber sur le sol comme une vieille chaussette !
Mais, j’apprends.
Puis comme la sclérose en plaques met une « permanente inconstance à la vie », les gestes que je pouvais faire hier ne sont pas les mêmes aujourd’hui. Les sensations que je ressens sont une perpétuelle nouveauté.
A long terme, je sais que mes jambes deviendront du coton. Rien n’est jamais écrit, c’est vrai mais disons que c’est une possibilité encore plus tangible que celle d’avoir un accident et une bonne manière de ne pas oublier que des changements, j’en vivrais encore plein.
S’adapter, toujours
Je disais, avant cette poussée, que perdre mes jambes ne me gênerait pas tellement parce que en soi, cela fait cinq ans que je circule avec mes ailes roulantes.
Et c’est vrai, ça ne me gêne pas tellement (surtout que pour faire de l’escrime mes jambes ne me servent à rien !) mais il n’empêche que je me suis rendu compte que c’était un changement pas si petit que ça.
Mon appartement était accessible à l’ancienne moi, à la nouvelle un peu moins.
Mes toilettes sont comme les vôtres et mon fauteuil ne passant pas à côté, j’ai eu des moments de grandes solitudes en les regardant et en me demandant comment les atteindre !
L’autre jour, j’ai aussi brûlé mes cheveux en faisant la cuisine sur mes plaques de cuisson, maintenant à la hauteur de mon menton et donc de mes cheveux longs !
Et ma baignoire que j’aime tant, ben je l’aime un peu moins!
A l’extérieur aussi, ça m’a confronté à de nombreux changements.
J’ai une amie, qui a un intérieur avec des portes minuscules ou mon fauteuil ne passe pas. Avant je faisais les deux, trois pas qui me séparaient de son canapé, maintenant, je ne peux plus. J‘ai dû trouver d’autres systèmes pour circuler chez elle.
Et même si des fois, ça me fait ressembler à un ver de terre, j’y arrive !
Et dans la tête alors ?
Du coup, je suis de nouveau en pleine période d’adaptation mais je crois que ma maladie m’a appris que justement je pouvais m’adapter. Et n’est-ce pas le propre de l’homme, malade ou non?
Ce n’est pas toujours simple.
Mes solutions ne sont pas toujours très prudentes ou sécurisantes, encore moins élégantes (oui quand j’avance sur les fesses et avec la force des bras, j’ai plutôt l’air d’une limace que d’une fille), et simples à expliquer à mes proches qui doivent aussi s’adapter à ces changements perpétuels, mais elles fonctionnent!
Ce n’est ni la première ni la dernière fois que je dois m’adapter et même si mon cerveau en est un peu chamboulé, je continue à être moi et à faire ce que j’aime. Tous ces changements ne seront justement que ça, des changements et des adaptations.
Alors en fait, j’avais tort, perdre encore un peu plus le contrôle de mes jambes, ça compte beaucoup mais j’avais raison, ça ne me gêne pas tant que ça.
Bonjour, je vous remercie et vous encourage à persévérer !
Un de mes compagnons d’infortune en centre de réadaptation, devenu ami après nos 2 séjours souffre pour les mêmes raisons que vous, pourtant il est sportif, nerveux, beaucoup plus jeune que moi et arrive même à se déplacer assez vite avec un fauteuil basique (Invacare action 4)car il refuse de se faire à l’idée d’être condamné à vie à la chaise à roulettes.
Je suis aussi souvent en fauteuil mais ultra léger rigide (<9kg) car double amputé tibial: autant je m'adaptais quand j'avais encore un pied (béquilles à l'extérieur) mais avec 2 prothèses même évoluées, certains réveils sont laborieux pour les premiers pas matinaux et, selon la météo, j'ai parfois l'impression d'avoir des "chaussures" trop petites et mal réglées.
Sortir faire quelques courses avec un rollator qui zigzag au freinage est déconseillé les jours de pluie et même fier d'être redevenu grand ne rassure pas quant à sa vulnérabilité: si je tombe, suis incapable de me relever sans appui et il n'y a pas des poteaux tous les 5 m.
Comme je souffre d'artérite depuis tout petit je me force au maximum d'exercices physiques afin de ne pas courir le risque d'amputation supplémentaire mais cette fois au dessus du ou des genoux et j'ai vu beaucoup de "collègues" diabétiques se faire "saucissonner" petit à petit au fil des années: tout le monde n'a ni le moral ni la force de s'adapter, surtout les gens d'un certain âge.
Enfin comme vous le soulignez par ailleurs, je suis globalement fier de mon fauteuil de course noir avec roues à rayons orange (pas commun) et tout autant du scooter électrique rouge Ferrari que je ne sors que le Dimanche pour "monter à Paris" depuis ma banlieue, heureux comme le vieux gamin que je suis devenu.
Au plaisir de lire la suite de vos aventures avec le même humour.
Quelle belle leçon zen, cette impermanence des choses que tu décris si bien et que tu acceptes avec tant de philosophie ! En tout cas, ne t’inquiète pas pour ta prochaine venue chez nous : au rez-de-chaussée, nos WC sont installés dans une pièce qui fait au moins 20 m2 !! (elle sera réduite quand nous cloisonnerons, mais ce n’est pas pour tout de suite)
Et puis pour les balades, que ce soit en fauteuil ou à dos d’homme, tu sais que rien ne nous effraie !! 🙂 🙂
Plein de bisous et bon courage pour ce nouvel apprentissage.
20 m2? Ca devrait aller!! Je vais me perdre vous avez prévue un plan avec boussole!!