Ecrire
ECOUTONS,  Il n'y a pas que moi qui écrit

Auteur, un métier à part entière

J‘ai décidé en fait non, j’avais envie depuis le début de parfois donner la parole à des personnes qui ont ou font des choses qui m’intriguent, m’interrogent. L’idée est toujours de voir ou d’entendre ce qu’on ne voit pas, ce qu’on n’entend pas.
Aujourd’hui voici le texte de Magali. Elle est écrivaine. J’ai souvent entendu des gens dire qu’ils rêvaient d’écrire et fantasmer sur ce métier qui leur paraissait si magique.
Elle c’est le sien.

Métier créateur de fantasmes

 

couverture
Mon premier livre

Dès que j’ai su lire et écrire, j’ai su autre chose : que je serais écrivain. Présomptueux, de la part d’une gamine de six ans ? Non, parce que j’ignorais alors que ce métier était auréolé de fantasmes. Pour moi, c’était juste chouette d’inventer des histoires et de jongler avec des mots que je ne pouvais pas utiliserdans la cour de récré.

J’ai donc plus ou moins toujours écrit, et cela fait quelques années que je me considère vraiment comme écrivain. Surtout depuis la publication, en 2013, de mon premier livre.

Pourtant, la plupart du temps, quand on me demande quel métier je fais, je réponds que je suis traductrice.
C’est plus simple. Parce que si je dis que je suis aussi auteure, la mécanique du fantasme se met en marche illico : les gens m’imaginent dans une vie de liberté absolue, marquée par les grands élans d’inspiration lyrique.
C’est peut-être vrai pour certains auteurs. Pas pour moi.

Je suis toujours un peu agacée quand, dans un film, une voix off « lit » le chef-d’œuvre qu’un personnage est en train d’écrire. Et c’est beau, et ça coule comme d’une source intarissable !
Jamais on ne montre les ratures, les heures passées sur trois lignes, les cheveux arrachés à essayer d’assembler deux bonnes idées qui, mises côte à côte, deviennent mauvaises comme par maléfice… Ou alors, c’est que l’on met en scène un poète maudit, un de ces crève-la-faim devenus millionnaires posthumes.

 

Auteur: un métier à part entière

Je ne dis pas cela parce que j’aspire à une gloire inaccessible mais parce que, de mon point de vue, auteur est un métier à part entière.
Bien sûr, il faut avoir du goût pour les mots, un brin d’imagination et des choses à raconter. Mais surtout, il faut bosser ! Et dur ! Quand je suis à la peine, tentée d’abandonner un texte pour le reprendre à un moment où je serais soi-disant « plus inspirée », je me répète : 1% d’inspiration, 99% de transpiration (il paraît que c’est Edison qui a dit ça). Eh bien croyez-moi, je transpire sévère !

ME_138_Perspiration
« Le génie c’est 1% d’inspiration… et 99 % de transpiration! Le 1 % je verrai plus tard… »

Écrire exige une véritable discipline.
Beaucoup d’auteurs vous épateraient en évoquant leurs horaires de travail, parfois à la limite du stakhanovisme.
L’écriture, c’est comme la brasse-coulée : ça ne s’oublie pas, mais seule une pratique régulière permet de s’améliorer. Voilà pourquoi, entre autres raisons, je participe à des concours de nouvelles.

De toute façon, je préfère avoir plusieurs casseroles sur le feu.
Notamment parce que les projets de longue haleine, romans ou recueils de contes, avancent toujours à une lenteur exaspérante.
Ce n’est pas facile de ne pouvoir montrer aucun texte achevé pendant des mois.
Pas plus que d’attendre, pendant des mois aussi, les réponses des éditeurs.

 

L’aspect moins glamour

Auteur; JamesBond des éditeursEt j’en arrive à la seconde facette du métier d’auteur, souvent méconnue, celle dont ne parlent pas les voix off des films. La facette administrative.
Bien sûr, l’écrivain qui a un agent, il s’en fiche. J’aimerais bien, moi, en avoir un (surtout s’il s’appelle James).
Il ne serait jamais au chômage parce qu’il chercherait les éditeurs susceptibles d’être intéressés par mon futur best-seller, les relancerait au bout de 6 / 12 / 24 mois, parlerait de mes œuvres impérissables aux médias, répondrait à mes fans, me ferait des massages…
En attendant de trouver (de quoi payer) un James, je fais tout ça moi-même. (sauf les massages).
Encore que, je n’ai pas à me plaindre, les médias et les fans me laissent plutôt tranquille.

J’essaie également de me professionnaliser en adhérant à des organismes (La CharteLR2L) et en assistant à des formations qui, contrairement à ce que vous pourriez croire, consistent rarement en des ateliers de création.
Il s’agit surtout de comprendre comment cotiser à la retraite et négocier un contrat d’édition.

 

Être auteur et en vivre

 

Comme beaucoup d’auteurs (mais pas tous, ça laisse de l’espoir), je suis trèèèèès loin de pouvoir vivre de mon écriture. D’où mon activité de traductrice. Saviez-vous que les auteurs et les illustrateurs, pourtant à la base de l’industrie du livre, sont plus mal payés, et de trèèèèès loin, que les autres professionnels du livre ? Certes, je caresse le rêve de pouvoir un jour vivre de ma plume, quitte à écrire, en plus des romans et nouvelles qui me tiennent à cœur, des textes sur commande, moins personnels (mais plus lucratifs ?).
En attendant, j’ai appris à accepter cet état de fait. Il faut se faire une raison.

De quoi vit un auteur

Cette situation me confronte sans cesse au même dilemme : si je ne peux gagner ma vie en écrivant, il faut que je travaille par ailleurs, mais si je travaille par ailleurs, quand trouver le temps nécessaire à créer ?
Car il n’est pas question de ne plus dormir ni de sacrifier ma vie familiale et sociale.

http://monmacon.tumblr.com/post/52787867124/non-mais-serieusement-tu-fais-quoi-pour

 

Le fait qu’un auteur ait du mal à vivre de son écriture entraîne souvent une conséquence fâcheuse : son métier n’est pas considéré comme tel, surtout s’il travaille chez lui.

 

Il faut dire que beaucoup de Français écrivent ; mais pour la plupart, c’est un loisir. Les auteurs doivent donc se battre pour faire admettre, par exemple, que pour animer un atelier d’écriture dans une école, ils ont besoin d’être non seulement défrayés pour le déplacement, mais aussi payés pour leur prestation.

 

 

 

Loin de moi l’idée de brosser un tableau désespérant de ce beau métier ! Si je ne l’aimais pas, personne ne m’obligerait à l’exercer.

Car même s’il est difficile d’être considéré(e) comme un(e) professionnel(le) et de vivre de son art, il y a toujours le bonheur de s’envoler dans sa bulle, de malaxer les phrases comme une argile, de faire rouler les mots dans sa bouche, de raturer, d’effacer, de recommencer, de porter au public un texte et ses respirations, en sentant son cœur cogner parce que se donner à lire, c’est aussi troublant que se dévêtir.

Me voilà d’ailleurs toute nue, alors si vous le permettez, je vais regagner le vestiaire.

 

Et si vous voulez voir ce que Magali fait de manière encore plus concrète: https://magalitardivelbrieussel.wordpress.com/.

 

4 commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *