Escrimeuse dans le monde du handicap: pouce levé et joyeux
REGARDONS

Escrimeuse dans le monde du handicap

Il y a une semaine, j’ai effectué un stage d’escrime. Jusque là rien d’étonnant pourriez-vous me dire…
Mais ce stage était mon premier ce qui déjà le met à une place toute particulière et surtout c’était un stage handi.
Il y avait des escrimeuses en fauteuil roulant, des escrimeurs déficients visuels et des personnes valides.

Déroulement

Bon pied bon oeil n'est pas toujours celui qu'on croitJ’ai eu l’impression de me retrouver en camp de vacances mais en mieux!
D’abord nous étions logés à l’hôtel et non dans un sordide dortoir parfait pour les batailles de polochon mais pas pour se reposer.
Il y avait une dizaine de personnes déficientes visuelles allant de la personne ayant perdue de son acuité visuelle suite à une maladie à la personne non voyante depuis la naissance.

Donc première leçon, il y a autant de causes de cécité que de sorte de handicaps moteurs. Ça vous paraissait évident, à moi aussi… mais je n’y avais jamais pensé!
J’ai donc passé deux nuits dans un Campanile et mangé trois fois au resto. Quoi vous n’en avez rien à faire?
Je ne vais pas souvent au resto encore moins à l’hôtel donc moi j’avais l’impression d’être une reine!!
J’avais même une baignoire et une télé! Et là, je passe pour l’ardéchoise jamais sortie de chez elle et qui vit encore au temps du silex!

Sinon, j’ai passé trois jours à pratiquer l’escrime de 9 à 17h et ça c’est le paradis!
Manque de pot j’étais malade donc j’ai très peu dormi, mangé comme un moineau anorexique et fais du sport 6h30 par jour. Autant vous dire que je suis rentrée épuisée.

 

Escrime déficient visuel

Ce n’est pas parce que je suis handicapée que je connais tous les handicaps. Et là j’ai appris, tout simplement.
Donc pour tous ceux qui pourrait en douter, oui on peut faire de l’escrime en était non voyant.
Tout le monde est mis au même niveau puisque chacun a les yeux bandés qu’il voit des ombres, rien du tout ou complètement (des valides peuvent aussi tirer de cette manière).
Ils tirent toujours à l’épée, les règles du sabre et du fleuret n’allant pas avec le besoin de contact entre les lames.

Ils tirent (terme pour parler de l’action de jouer à l’escrime) debout sur une piste identique à celle utilisée par les personnes dites valides. Vous pouvez aller lire si vous avez eu le toupet de louper mon article sur l’escrime!
Avant chaque assaut, ils doivent toucher la lame de l’adversaire. Ce simple contact leur permet de situer leur adversaire. Voici même une petite vidéo lors de compétition.


Ils sont arbitrés par une personne voyante qui entre les touches leur dit de se replacer si nécessaire. Dans certains pays, les escrimeurs sont guidés à la voix ce qui n’est pas le cas en France. Ici, ils situent la piste en touchant le sol du bout de leur épée. L’arbitre leur indique juste s’il doivent s’avancer, se reculer ou se décaler pour être à la bonne distance en début de match.
Le problème de ces différences de réglementation selon les pays est que cela rend compliqué les compétitions d’ordre international. Pour l’instant il n’y a pas de catégorie déficient visuel aux jeux paralympiques.

Mon expérience

J’ai pu par moi même vivre l’expérience en tirant avec une personne déficiente visuelle. Bien sûr nous étions sur les fauteuils roulants et nous avions les yeux bandés.
La sensation est vraiment étonnante.

Il faut sentir l’autre, avoir conscience de son corps dans l’espace et de celui de l’adversaire. Je sais qu’ils utilisent beaucoup le son pour ma part étant à moitié sourde je ne risque pas de m’aider de ce sens là.
Nous avons fait des échanges tranquilles sans aucun but de score ce qui a permis à l’une et l’autre de se familiariser avec des conditions dont elle n’avait pas l’habitude.
Lors de ma dernière touche j’ai demandé où je l’avais touché et j’ai étais surprise de me rendre compte que ça correspondait à ce que je pensais.

Certes au début c’est un peu compliqué puis les autres sens se mettent en éveil (pas l’ouïe pour moi, vous l’aurez compris) et effectivement on finit par avoir une image mentale de la personne en face.
A tout escrimeur, je le conseille; tentez l’expérience, vous serez surpris et vous apprendrez beaucoup.

Escrimeuse avant tout

Le dernier point qui a rendu ce stage fatigant mais reposant est le handicap.

Pour une fois, je n’étais pas la différente au milieu des autres.
Je vis assez bien mon handicap ou en tout cas je m’y suis habituée.
Mais même si je ne souhaiterais pas être « ghétoisée » dans un monde à part pour les handicapés, c’est reposant de ne pas se sentir à part.

Je ne me noyais pas dans la masse, la masse n’étant déjà pas assez nombreuse et les handicaps étant très variés.
Mais quoi qu’il en soit, tout était fait pour que mon handicap ne soit pas un problème.
Quand j’avais besoin de me reposer à cause de ma colocataire (vous pouvez lire , si vous avez oublié les conséquences de la SEP), je me couchais dans un coin du gymnase et personne ne le remarquait. On me donnait ce qu’il fallait pour que je sois bien puis c’est tout.
Que c’est reposant de ne pas expliquer, de ne pas être regardé.

J’avais peur dans un monde lié au handicap de perdre mon identité liée au handicap. Mais en fait, je me suis rendue compte que mon statut d’handicapée n’est pas mon identité; elle en fait partie mais n’en est pas l’intégralité et ne ressort que dans un dans un monde de valides. Je ne suis de loin pas que ça et quand je pratique l’escrime, je suis escrimeuse avant tout.

C’est un constat assez bête mais qui me fait du bien!

Pour continuer: Handi escrime créateur de MON sourire.

11 commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *